Questions à Chantal Mazzolini, aide-soignante en EMS.
Quel a été l’impact de la pandémie dans votre EMS ?
Chantal Mazzolini – Notre métier est très exigeant. Au fil des années, les résident-e-s arrivent de plus en plus affaibli-e-s en EMS, car on les maintient à domicile le plus longtemps possible. Quand ils et elles arrivent chez nous, certain-e-s sont très atteint-e-s au niveau physique et psychologique. Pour résumer, nos résident-e-s sont malades la plupart du temps, et parfois ils et elles vont bien. Tous les jours, nous devons donc nous réorganiser en fonction de leur état de santé.
La pandémie a renforcé l’affaiblissement de certain-e-s résident-e-s. Cela a rendu la situation encore plus lourde.
Quand il y a des contaminations, cela implique de mettre tous les pensionnaires en isolement. Or il très difficile de faire comprendre à certaines personnes la nécessité de rester isolées. Nous devons ainsi être tout le temps derrière elles, vérifier que les mesures sont bien respectées. Cela donne autant de boulot que les soins prodigués aux malades du Covid.
Qu’en est-il de vos conditions de travail ?
Le Covid-19 a entraîné une forte augmentation de la charge de travail.
Il y a aussi plus de stress, parce que nous devons être attentifs-ives à tous nos gestes, afin d’éviter la propagation du virus.
Avec le coronavirus, de nouvelles tâches se sont ajoutées: la désinfection systématique, les vêtements de protection à enfiler puis enlever dès que nous nous rendons dans la chambre d’un-e résident-e en quarantaine. Cela alourdit notre quotidien.
Ensuite, nous avons eu plus d’absences maladie. Or quand une soignante manque, c’est une autre qui doit venir la remplacer – avec souvent des problèmes d’organisation à la clé.
Heureusement, la situation est plus calme aujourd’hui.
Les employeurs veulent « simplifier » la CCT santé 21, qu’ils considèrent « trop coûteuse ». Comment réagissez-vous ?
Au cours des derniers mois, nous avons tout donné.
Dans notre établissement, nous avons eu droit à une prime de 150 à 340 francs, calculée selon notre temps de présence durant le pic épidémique. C’est positif. Mais le canton n’a pas généralisé cette pratique, ce qui montre l’absence d’une reconnaissance du travail effectué par les personnels de santé.
Comme si ce n’était pas suffisant, les employeurs manœuvrent pour affaiblir notre CCT. Ils veulent notamment diminuer les indemnités, le temps de vacances, annualiser le temps de travail – déjà passé de 40 heures à 41 heures lors du dernier renouvellement conventionnel – et remettent en cause la progression des salaires.
C’est le signe d’une absence totale de reconnaissance de notre engagement intense ! C’est injuste, et ça fait mal.
Qu’en disent vos collègues ?
Elles sont de plus en plus intéressées à l’évolution du dossier. Car si les revendications patronales passent, cela aura de sérieuses conséquences.
Exemple. Beaucoup de mes collègues travaillent à 50%, car elles ont des enfants. Aujourd’hui, c’est déjà compliqué quand elles doivent remplacer une absente. Mais si l’annualisation de la durée de travail passe, ce sera bien pire: on leur demandera d’être là tout le temps en cas de charge de travail élevée, puis on les renverra à la maison quand il y aura moins de boulot. Ce n’est impossible de gérer une vie de famille dans ces conditions.
Certaines de mes collègues disent qu’elles changeront de travail si la CCT 21 n’est pas renouvelée. Beaucoup arrêtent déjà aujourd’hui. Pas parce qu’elles n’aiment plus leur travail, mais à cause des mauvaises conditions dans lesquelles elles le réalisent.
Comment faire échec au démontage de la CCT ?
Nous devrons nous mobiliser, il n’y a pas d’autre solution. S’il n’y a personne derrière les délégations syndicales qui négocient, nous n’arriverons à rien. En revanche, si nous nous mettons ensemble pour défendre nos conditions de travail, nous pourrons obtenir un bon résultat.
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20.03.2021 | CCT 21 interview Mme Mazzolini | PDF (99 kB) |