Contre la fermeture du CEFNA

Avec la suppression de 16,3 EPT et le désengagement de l’État dans la formation d’adultes pour les plus vulnérables, la casse sociale se poursuit. Le SSP et le SAEN demandent que le secteur des compétences de base soit réintégré dans les Écoles professionnelles comme c’était le cas avant la création du CEFNA.

photo Eric Roset

Le 26 novembre 2019, Mme Maire-Hefti, cheffe du Département de l’Éducation et de la famille (DEF), annonçait au personnel du Centre de formation pour adultes (CEFNA), puis à la population, la décision du Conseil d’État de mettre fin aux activités du CEFNA en décembre 2020. Si la plupart des activités seront transférées dans les écoles professionnelles du canton, le secteur des compétences de base sera supprimé, hormis quelques cours pour les jeunes migrants. Cela engendrera la suppression de 16,3 EPT et une bonne vingtaine de formateurs-trices perdront leur emploi (sans compter les formateurs-trices occasionnels qui ont déjà été remercié-e-s).

Le secteur des compétences de base voué à la disparition a pour client le Service de l’emploi et ses formations sont destinées en majorité aux adultes les moins qualifiés professionnellement et les plus fragiles sur le marché du travail. En 2017, avec l’aval du Conseil d’État, le COSM avait déjà retiré ses cours au CEFNA pour les confier à l’École-club Migros, attribuant de ce fait les deniers publics à une entreprise privée.

Conséquences graves pour les bénéficiaires et le personnel
Cette décision a des conséquences graves. Les personnes au chômage qui ont besoin d’une remise à niveau en français écrit ou oral, en mathématiques ou dans le domaine des nouvelles technologies afin de conserver ou de retrouver un emploi se voient ainsi privées de mesures adaptées et éprouvées. En effet, à ce jour, aucune stratégie ne semble prévue pour suppléer à la suppression du secteur des compétences de base au CEFNA. Le seul leitmotiv du Conseil d’État est que ce secteur est désormais ouvert au marché privé. Ceci revient à confirmer que le choix politique des plus hautes instances du canton consiste à confier la formation des plus vulnérables à des entreprises dont la vocation première est de faire des affaires et du bénéfice, tout en finançant ces mêmes entreprises avec de l’argent public.

Outre la disparition d’un dispositif de formation fonctionnant avec le Service de l’emploi depuis environ 25 ans, ainsi que des compétences de ses formateurs et du professionnalisme d’une équipe, c’est également la précarité de ses salariés qui semble programmée.

Que dire sinon que le Conseil d’État à majorité socialiste démantèle les services de l’État, précarise son personnel qualifié et expérimenté en l’envoyant vers des emplois instables et précaires ou vers un chômage durable, externalise les services de l’État et ne garantit plus un accueil réfléchi et projeté vers l’avenir des plus fragiles sur le marché de l’emploi.

Dans les institutions privées de formation, le personnel travaille sur mandat ou sur appel, pour un salaire horaire bas et souvent sans protection sociale comme la LPP. Il peut donc difficilement se projeter dans la durée. D’où des craintes quant à une qualité péjorée de la formation et un développement de mesures adaptées et adaptables au public sérieusement remis en question. Ceci interpelle d’autant plus qu’aucune mesure ne semble jusqu’ici avoir été prévue pour évaluer la qualité de la formation dispensée par les entreprises privées et donc la manière dont l’argent public est effectivement investi.

Madame Maire-Hefti avait dit en son temps au personnel que la formation en compétences de base était une fonction régalienne de l’État. Que signifie l’externalisation d’une fonction régalienne ? Ceci alors qu’un dispositif rôdé, performant, réactif et capable de s’adapter aux exigences d’un client auquel il donne satisfaction est en place ? Pourquoi donc repartir à zéro alors que tout existe et fonctionne parfaitement ? Cette politique d’économie à court terme s’apparente à une fuite en avant, sans vision pour l’avenir.

Poursuite du démantèlement social
Aujourd’hui, en abandonnant les compétences de base pour les adultes au CEFNA, mais aussi en sabrant une énième fois dans des secteurs touchant les personnes les plus fragilisées de notre canton (l’accueil des adolescent-e-s en rupture, la suppression de places en foyer d’accueil pour les enfants, etc.), le Conseil d’État poursuit sa politique d’austérité et menace la cohésion sociale du canton.

Le chef de Département de l’économie et de l’action sociale (DEAS) promet l’ouverture, sans cesse repoussée, d’un centre de formation pour les migrant-e-s adultes (projet Espace). Mais personne aujourd’hui ne sait quelle forme aura ce centre ni quelles seront ses conditions de travail. Le bruit court fortement qu’il s’agira d’un centre externe à l’État reposant principalement sur les subventions des associations actives dans le domaine de la migration qui, rappelons-le, travaillent avec des formateurs-trices bénévoles. Si cela se confirme, cela permettra à l’État de faire de nouvelles économies. Inutile de préciser que les débouchés pour les formateurs-trices du CEFNA seront inexistants… Par ailleurs, ce centre ne sera destiné qu’aux personnes dépendantes de l’asile. A nouveau, on ne sait pas ce qui est prévu dans le domaine des compétences de base pour les personnes liées au service de l’emploi et qui se formaient au CEFNA.

Revendications syndicales
En créant le CEFNA en 2013, le Conseil d’État a retiré des Centres professionnels la formation continue pour adultes, y compris les compétences de base. Dès lors qu’aujourd’hui le Conseil d’État a décidé de réintégrer la formation continue dans les centres professionnels, le SSP et le SAEN demandent au Conseil d’État d’y réintégrer également les formations dispensées dans le cadre du secteur des compétences de base. Cela permettrait à l’État d’assumer son rôle social envers les bénéficiaires des formations ainsi que son rôle d’employeur responsable envers son personnel et ainsi d’éviter les suppressions de postes et les licenciements consécutifs.