Quelques réponses à vos questions sur les effets de la baisse des cotisations
Voici quelques réponses aux questions que vous nous avez posé ces dernières semaines. En revanche, nous ne pouvons pas répondre aux questions concernant votre situation personnelle. Elles doivent être directement posées à la caisse. C'est le personnel de la caisse qui est seul habilité à répondre à vos questions lors d’entretiens individuels.
N’hésitez surtout pas à les contacter sur leur site internet
Quels sont les effets directs de la baisse de cotisations sur les personnes qui touchent une rente aujourd’hui ?
Aucun effet puisque seules les personnes qui cotisent, soit les assuré-e-s actifs-ves, sont concerné-e-s. Au moment du départ à la retraite, le capital est assuré pour l’ensemble de la retraite. Les rentes pourraient seulement être affectées par l’indice des prix à la consommation (IPC), mais ce cas doit être décidé par le Conseil d’administration (par exemple en cas d’inflation).
Est-ce que je peux savoir aujourd’hui si ma rente future sera affectée par cette baisse des cotisations ?
Aujourd’hui on ne peut pas répondre à cette question, mais le risque existe. Pour rappel, ce qui est déterminant c’est le capital au moment du départ à la retraite. La baisse des cotisations affecte sur le long terme ce capital, mais ce n’est pas l’unique facteur puisque le capital de l’assuré·e est complété par des intérêts qui peuvent contribuer à augmenter substantiellement ce capital. (Des intérêts dont les taux sont décidés par le Conseil d’administration).
La caisse propose un plan d’Épargne complémentaire « Épargne+ » afin d’investir cette économie de cotisations. Est-ce que j’ai avantage à accepter cette offre ?
Libre à chacune et chacun d’épargner ce montant ou d’en bénéficier immédiatement. Cela étant dit, la réalisation d’une épargne au sein même du 2e pilier comme proposé par le plan « Épargne+ » plutôt que dans une épargne individuelle de type 3e pilier rapporte davantage. En effet, cet argent est placé dans la fortune globale de la caisse qui bénéficie de bonnes conditions de rendements. Ce montant annuel ainsi épargné peut être déduit fiscalement jusqu'à concurrence de CHF 6'883.- (idem pour le 3e pilier).
Primautés et plans différents des caisses publiques
Par Stefan Giger, Secrétaire général du Syndicat des services publics (SSP), article publié dans le numéro 181 du journal "Page de gauche" voir le dossier complet "Repenser les caisses de pension" sur son site internet.
Traditionnellement en Suisse romande, les caisses publiques étaient organisées selon la primauté des prestations. Cela veut dire que, selon le règlement de la caisse, la rente est définie en pour cent du salaire assuré. Depuis la réforme « structurelle » de la LPP il y a dix ans, pour une caisse de droit public, le canton ou la commune définit par la loi soit la prestation, soit le financement d’une caisse, mais seulement l’un ou l’autre. En règle générale pour les caisses en primauté des prestations, la collectivité publique a choisi de définir le financement et laisse donc à l’organe suprême de la caisse le soin de définir la prestation. Mais cet organe (composé à moitié par des représentant·e·s des assuré·e·s) n’a plus vraiment le choix. Si l’espérance de vie augmente (heureusement) et dans le cas où le financement ne suffirait plus pour financer l’ancien niveau de rente (malheureisement), la caisse est obligée de baisser les prestations, par exemple en augmentant l’âge de la retraite (« l’âge pivot ») ou en baissant le taux de rente. Si l’on essaie de maintenir les prestations, il faut alors adapter le financement, ce qui n’est plus dans la compétence de l’organe suprême mais dans celle du parlement.
La primauté des cotisations avec objectif de prestation
En Suisse alémanique, depuis longtemps, presque toutes les caisses publiques sont passées à la primauté des cotisations (certaines caisses romandes sont en train de suivre l’exemple). Cela signifie que la rente dépend du capital accumulé de l’individu multiplié avec le taux de conversion. Cependant, même si l’on a choisi la primauté des cotisations, on peut ancrer un objectif de prestation. Ainsi, dans l’acte de fondation de plusieurs caisses publiques, nous avons réussi à introduire un tel objectif, par exemple dans la plus grande caisse de Suisse, celle du canton de Zurich (BVK). Dans l’acte de fondation, la caisse est obligée de construire un plan de capitalisation qui permet de financer une rente qui correspond à 60% du salaire assuré. Dans le cas où l’espérance de vie augmente et le taux de conversion est abaissé, l’acte de fondation oblige la caisse à augmenter les cotisations, et donc à adapter le financement – et l’employeur doit suivre.
Le choix de la primauté n’est pas décisif
L’essentiel ne consiste donc pas dans le choix de la primauté, mais dans le fait de savoir si le règlement de la caisse assigne un objectif correct de rente. En tant que Syndicat des services publics, nous nous battons pour ancrer – et réaliser dans la pratique – un objectif adéquat de prestation. Cet objectif de prestation n’est d’ailleurs pas une exclusivité des caisses publiques. On trouve aussi parmi les caisses privées bon nombre d’institutions qui ont un objectif de prestation.
Multiplication des plans de retraite
Un des problèmes qui nous tracassent se trouve dans l’éparpillement des plans de retraite. Ces dernières années, plusieurs caisses ont commencé à offrir plusieurs plans de retraite à la place d’un seul. La plupart du temps, le plan principal est resté plus ou moins le même, souvent un plan avec un objectif de prestation de 60% du salaire assuré. Mais sur demande de certains anciens employeurs ou bien lorsque de nouveaux employeurs se sont affiliés à une caisse, les caisses ont créé des plans « moins chers », avec un objectif de prestation plus bas, voire inexistant.
Ce problème s’accentue lorsque les collectivités publiques privatisent certains secteurs. Tant que l’hôpital était partie intégrante de l’administration cantonale, l’infirmière était assurée au même niveau que le fonctionnaire du département de la santé publique du même canton. Après l’externalisation de l’hôpital, son personnel risque de se retrouver avec un plan de retraite inférieur. Une nouvelle discrimination des professions féminines s’annonce donc – expérience vécue dans plusieurs cantons et communes. Il est donc essentiel de demander à la fois de rester à un seul plan de retraite, et, là où il y a déjà l’option de différents plans, d’obtenir un droit de véto pour tout changement de plan.
Retraites : une nouvelle mobilisation se prépare
Par Cora Antonioli, vice-présidente nationale du SSP, article publié dans le numéro 181 du journal "Page de gauche" voir le dossier complet "Repenser les caisses de pension" sur son site internet.
Dans le canton de Vaud, les salarié·e·s affilié·e·s à la Caisse de pensions de l’État de Vaud (CPEV) se préparent, une fois encore, à combattre des baisses de prestations. En effet, tous les cinq ans, le plan de financement d’une caisse publique doit être réexaminé. Le nouveau plan vaudois devra entrer en vigueur au 1er janvier 2023. Il vise à permettre de respecter le degré de couverture de 80%, imposé par la loi fédérale aux caisses publiques, d’ici 2052, avec des étapes intermédiaires.
Après le rejet du plan 2017, grâce à une mobilisation exemplaire de la fonction publique qui avait conduit au maintien du précédent plan — lequel avait déjà imposé une baisse des prestations — le Conseil d’administration de la CPEV va devoir soumettre un nouveau plan à l’As-SO (l’organe de surveillance des caisses de Suisse romande). Depuis la grève de 2018, la situation de la caisse n’a pas changé significativement ; le degré de couverture de la CPEV se situe largement au-dessus des étapes imposées (il était à 72,4% fin 2019 alors que le plan demandait 60% en 2020). À l’exception de l’année 2018, les rendements de la caisse ont été bons à excellents depuis de nombreuses années. Des chiffres qui ne vont donc décidément toujours pas dans le sens des prédictions des expert·e·s qui dessinent un avenir noir à nos retraites d’ici 2052…
Remarquons au passage la frivolité de ces « constats », pourtant ressassés inlassablement, qui tiennent donc plus de l’art divinatoire. Ceci nous amène à rappeler que les décisions liées aux prestations du 2e pilier sont d’abord des décisions politiques traduisant une volonté claire — et pas nouvelle — de s’attaquer aux conditions de travail et de vie des salarié·e·s, ici à celles et ceux qui s’engagent quotidiennement auprès de la population pour garantir à chacun·e le droit d’être informé·e, formé·e, soigné·e, protégé·e… Rappelons aussi que la responsabilité d’assurer le maintien des prestations revient d’abord à l’employeur.
Les salarié·e·s de l’État de Vaud préparent désormais la mobilisation, seul moyen de protéger leurs retraites face à un Conseil d’administration qui semble avoir d’autres priorités.